30 avril 2018

Emploi des seniors : L'imposture du " vieillir au travail" continue !

En matière d'emploi des seniors, les ministres du travail passent et le problème reste. En effet, au delà des effets d'annonces des gouvernements et des déclarations à l'emporte pièce des organisations patronales vieillir au travail devient de plus en plus une mission impossible.

En mars 2010, chômeur senior, j'entendais Xavier Bertrand alors ministre du travail annoncer que tous les chômeurs seraient reçu dans les trois mois. L'objectif étant de : "déterminer le type de suivi le plus adapté à la personne". Une réunion eu bien lieu au Pôle Emploi dont je dépendais où un conseiller que je voyais pour la première fois me félicita pour ma recherche "dynamique" mais me confia ne pas avoir souvent de demande pour des salariés de plus de 55 ans. Game over !

En résumé, trop jeune pour partir en retraite mais trop vieux pour occuper un emploi ! Et pourtant, en fouillant un tout petit peu dans mes archives, j'ai trouvé ce que déclarait Laurence Parisot grande pourfendeuse de la retraite à 60 ans au nom du Medef : " ... / ... je considère que pour nous, les entreprises, il y a avec cette réforme des retraites, un gros travail qui ne fait que commencer. Nous aussi, nous avons des efforts à mener. Nous aussi, nous avons des changements de comportement à installer ... / ... aller plus loin encore en matière de condition de travail, d’adaptabilité des postes de travail pour les plus anciens ... / ... On est à un tournant. Mais pour bien prendre le tournant, il ne faut pas se tromper sur l’analyse objective de la situation. Et si on arrive à faire cette analyse objective, je pense que l’on peut bien amorcer cette nouvelle ère "

Où en est-on, de cette nouvelle ère en 2018 ?

L'OCDE au travers d'un graphique nous montre à quel niveau entreprises et gouvernements français placent la priorité des seniors dans l'emploi. La France se classe 33eme sur 41 avec 52,2% des 55-64 ans étant toujours en emploi. 


Et même si nous allons devenir comme le prétend notre Président LA "Startup nation" dans l'immédiat, pas de quoi pavoiser ! Car, les ruptures conventionnelles classiques ou collectives proposées à des salariés de 57 à 59 ans prouvent bien que les "changements de comportement des entreprises" clamés hauts et forts par Laurence Parisot n'étaient, une fois de plus qu'une imposture.

En ce qui concerne ceux qui sont au chômage, comme nous l'indiquions dans un précédent article. En 2016 : "Les personnes âgées de 50 à 64 ans n'étaient que 12,9% à trouver un emploi dans le trimestre qui suit l'inscription à Pôle emploi" donc, ils sont les plus exposés au chômage de longue durée antichambre de la fin de droits !

Devant tant de mansuétude et d’efficacité, on prendra quelque plaisir à la lecture d'une  étude/avis émise tout récemment par le Conseil Economique Social et Environnemental (CESE) consacré à l'emploi des seniors.

Les Echos : "Dans son avis sur l'emploi des seniors, le Conseil économique, social et environnemental propose la création d'une aide financière spécifique à l'embauche de salariés de 57 ans et plus « jusqu'à l'acquisition des droits à retraite à taux plein" Aide financière que Les Echos qualifient de "contrat aidé spécifique"

Le CESE écrit : "... Leur surreprésentation parmi les chômeur.euse.s de longue durée, la suppression de politiques publiques de l’emploi favorables à l’insertion et au maintien dans l’emploi des seniors ou encore la permanence des préjugés à leur égard sont autant de signaux que la collectivité, dans son ensemble, doit prendre en compte pour agir sur la qualité de l’emploi et garantir une cohésion sociale entre les générations."

Ce qui laisserait entendre, au passage, que donner de l'argent aux entreprises les rendraient réceptives à l'âge des salariés ? On aimerait entendre les responsables de la CPME et du Medef sur le sujet.

Le gouvernement de son côté continue de pérorer sur les "fameux" emplois non pourvus ce qui permet de justifier les mesures répressive appliquées aux chômeurs et brandit sa loi : «pour la liberté de choisir son avenir professionnel» dans lequel, le "vieillir au travail" n'est tout simplement pas évoqué.

La liberté de choisir son avenir professionnel Monsieur le Président et Madame la ministre c'est également garantir la dignité de ceux qui ont travaillé plus de 30 ans et qui après une fermeture d'entreprise ou un licenciement économique aspirent à terminer leur carrière de la meilleure façon possible.

Mais que les seniors, forts de leur expérience, deviennent consultants affirme l'entourage économique de notre Président. Didier Hallépée fin connaisseur du sujet donnait une définition de ce poste : "Consultant : position sociale destinée aux Séniors que l’Entreprise considère comme trop âgés, trop compétents et surtout trop chers et dont elle se débarrasse en leur faisant miroiter indépendance, considération et rémunérations élevées grâce à un statut qui est à mi chemin entre le chômage en fin de droits et une retraite au nombre de trimestres insuffisant"

A vrai dire, l'imposture semble bien partie pour continuer longtemps ...