Le gouvernement et les organisations patronales hurlent à la pénurie de candidats dans certains métiers ou branches d'activité en oubliant de reconnaître que celle-ci est directement liée à des conditions de travail difficiles ou de faible rémunération.
Souvenez-vous, il y a encore peu de temps, vous aviez beau envoyer des tonnes de CV aux entreprises, vous ne receviez au mieux qu'un message laconique de refus et le plus souvent aucune réponse. À la même période, les CDD de courte durée étaient légion et le montant des salaires à son plus bas niveau. Aujourd'hui, si vous écoutez nos gouvernants et les organisations patronales, ceux-ci ne parlent plus que de pénurie de candidats.
Pénurie
à comparer toutefois avec les chiffres du chômage au quatrième trimestre 2022 : « … le nombre de personnes inscrites
à Pôle emploi et tenues de rechercher un emploi (catégories A, B,
C) s’établit à 5 113 400... »
Si nous excluons les éternels moutons à cinq pattes du type : data scientists, analystes des données ou plus exotique : les métiers du metavers, quels sont les secteurs les plus demandeurs ?
Prenons comme référence un dossier réalisé en 2022 par France Bleu et France 3. Extraits : « En dehors des emplois saisonniers, les métiers les plus recherchés sont les métiers des services aux entreprises, comme les agents d’entretiens de locaux, les ouvriers non qualifiés de l’emballage et les manutentionnaires. Les métiers de l’hôtellerie-restauration ainsi que ceux du soin et de l’accompagnement, notamment les aides à domicile et aides ménagères, sont également très recherchés »
Pour
mémoire, France Info publiait en 2013 l'article suivant : « Les
métiers en tension d'ici 2015 »
Quels étaient-ils ?
« Hôtellerie, restauration, aide à domicile, commerce : cette France qui recrute ... En tête : les assistantes maternelles et aides à domicile, les agents de service et d'entretien … » Ce à quoi on peut ajouter : les transports et le BTP
En résumé, le temps passe mais certains métiers continuent d'être fuis. Les raisons ? Elles sont connues : horaires décalés, délirants ou partiels, accélération des cadences, manque de respect et salaires trop faibles. Ajoutons à cela les difficultés de vieillir dans ces métiers où plus qu'ailleurs l'usure professionnelle est la règle. Et bien que notre Président n'aime pas le mot pénibilité, c'est pourtant bien ce mot qu'il faut utiliser le tout sur fond de report de l'âge de la retraite à 64 ans.
Pénurie de candidats ? Oui, vous répondront les entreprises mais surtout de candidats : « jeunes, flexibles, mobiles et bien formés ». Et les seniors expérimentés dont les entreprises se sont séparés en utilisant des ruptures conventionnelles individuelles puis collectives ? Il sont encore nombreux ces 55 ans à 60 ans à galérer pour trouver un emploi.
Car ne nous voilons pas la face, si les entreprises pleurent misère, on ne peut pas dire qu'elles sont très motivées à l'idée conserver ou d'intégrer des seniors à l'effectif. Nous en avons pour preuve la dernière intervention de Dominique CARLARC'H la porte parole du MEDEF qui déclarait : « Nous savons qu'il faut que nous nous attelions à la question de l’emploi des seniors, parce que, mise à part la crise de l'énergie, un de nos principaux problèmes c'est le recrutement » Comme par hasard, cette déclaration fait suite à des menaces de sanctions sur l'emploi des seniors dans le cadre du passage à 64 ans que le MEDEF, notamment, a soutenu.
Bref, en attendant que les organisations patronales et leurs adhérents veuillent bien se pencher sur l'avenir professionnel des seniors, une certitude : la pénurie de candidats va continuer de façon durable, quel que soit le contexte économique. Le monde a changé. Le dialogue social façon : « mon bureau vous est toujours ouvert … mais là j'ai pas le temps » n'est plus une réponse. Les conditions de travail et la considération sont aujourd'hui, pour les salariés, aussi importantes que la rémunération.