18 mai 2009

Baisser son salaire en temps de crise économique : Qu'attendez-vous pour baisser le votre Monsieur Hortefeux ?

Après le renflouement avec l'argent des contribuables des banques ayant joué et perdu, dans des opérations de titrisation de dettes de gens insolvables, le gouvernement vient d'avoir une nouvelle idée géniale pour surmonter la crise économique : Proposer aux salariés d'accepter une baisse de salaire pour aider leurs entreprises à surmonter les difficultés.

Vous sursautez ?

Et pourtant, voici le texte exact des déclarations du ministre trouvées dans le journal Le Parisien

Le ministre du Travail Brice Hortefeux a jugé dimanche qu'il n'était pas choquant qu'un employeur propose une baisse de salaire à un salarié pour surmonter des difficultés, à condition qu'il y ait des «contreparties» dans le cadre d'une «négociation interne à l'entreprise». Interrogé sur France 5 sur les baisses de salaires proposées par le loueur de voitures Hertz à ses cadres, M. Hortefeux a estimé qu'«en période de crise, l'effort doit être partagé». «Si un effort est demandé dans telle ou telle entreprise (...) cela doit être avec une explication et des contreparties», a-t-il ajouté.

«Si cela peut permettre de préserver l'avenir de l'entreprise, la diminution de salaire, ça ne me choque pas», a-t-il poursuivi, précisant que cela ne relevait pas du gouvernement mais d'«une négociation qui doit avoir lieu entre l'employeur et les salariés». «C'est à eux de déterminer si les mesures proposées permettent ou non de préserver l'avenir de l'entreprise (...) dans le cadre d'une négociation interne à l'entreprise» a ajouté M. Hortefeux.

Sans indiquer bien entendu de quelles contreparties !!!

Très en verve, il a ajouté : " En période de crise, l'effort doit être partagé (...) On ne peut négliger aucune piste" et "certains estiment que cela peut créer ou préserver 5 à 10.000 emplois"

Certains, mais qui ? Désolé, on en saura pas plus sur ces "certains" qui estiment ...

Et bien voila qui enterre définitivement le slogan qui est en partie responsable de l'élection de Nicolas Sarkozy : "Travailler plus pour gagner plus" Car, en effet ces déclarations nous indiquent que ce slogan est remplacé par "travailler plus pour gagner moins"

Car, si cette "participation" à la crise économique se traduit par une baisse effective, elle ne n'indique en aucun cas une baisse des heures travaillées !!! Ce qui signifie que les salariés vont faire un cadeau bien supérieur aux entreprises qui seraient tentées de leur proposer ce "marché"

Le député Jean-Michel Fourgous que nous avons interpellé lors de l'émission sur L'Europe Sociale sur LCP le confirme et l'explique sans complexe : "le code du travail, les grèves, les 35H00 et l'ISF sont des obstacles à une France moderne" les salaires actuels en font certainement partie ...

Ne nous voilons pas la face : Depuis que le travail salarié existe, tout le monde sait qu'une baisse des salaires n'est jamais compensée par une hausse équivalente lorsque l'activité économique retrouve sa santé. Et même si la baisse était compensée par un retour au salaires antérieur, rien n'indique dans les déclarations du Ministre, la moindre notion de rattrapage en cas de redémarrage de l'activité de l'entreprise.

Ce qui équivaut compte tenu de la durée probable de la crise, à une BAISSE certaine du pouvoir d'achat, le deuxième thème (chéri) de campagne de notre président.

Comment Brice Hortefeux justifie t-il cet "effort" demandé aux salariés ?

Cependant, a précisé le ministre du Travail, "s'il y a un effort qui est demandé dans telle ou telle entreprise, cela doit être naturellement avec une explication et des contreparties en termes de maintien d'embauches, en termes d'avenir".

En clair, ça signifie, comme d'habitude, que le gouvernement valide cette option sans imposer aucune contrainte aux employeurs et se fie à eux pour appliquer et gérer cette mesure. Si l'on en croît les propos du Ministre, il suffirait d'un engagement verbal (sans aucune base juridique) de l'employeur qui mettrait les salariés devant le fait accomplit : Seule, la "solidarité" salariale leur permettrait de "sauvegarder" leur emploi.

L'expérience Continental, notamment, montre que lorsque les salariés acceptent de diminuer une part de leurs salaires, aucune garantie de pérennité de l'emploi n'est accordée. Aucune garantie non plus que les employeurs ne trouveront pas une "astuce" pour maintenir le salaire revu à la baisse au nom de la compétitivité !

Alors, quant à parler d'avenir ... L'avenir, pour le Ministre, c'est semble t-il, la "fumeuse" participation en trois tiers que revendique l'Elysée et pour laquelle le MEDEF accepte mollement le principe et que la CGPME rejette violemment. Que du bonheur à venir ...

La proposition de la société Hertz qui a donné lieu aux déclarations de Brice Hortefeux n'est toutefois pas une nouveauté puisqu'elle s'inspire de celle appliquée par Renault, d'ailleurs justifiée par Laurent Wauquiez : "Si c'est la même méthode que Renault qui a dit à ses cadres "faites un effort sur vos congés, les ouvriers font un effort sur les congés et on ne licencie personne", c'est positif" Source AFP/Google

Néanmoins, n'oublions pas que Renault, (dont l'Etat est toujours le premier actionnaire) a bénéficié de prêts en contrepartie de clauses de maintien de l'emploi et s'est engagé à ne pas mettre en place de plans sociaux. Ce qui n'est pas le cas des autres entreprises qui ne sont liées par aucun engagement.

Alors que se passera t-il pour les salariés de ces entreprises qui auraient envie de "proposer" une baisse temporaire des salaires ?

Pour Brice Hortefeux "c'est une négociation qui doit avoir lieu entre l'employeur et le salarié", "cela doit être dans le cadre d'une négociation interne à l'entreprise", "sur la base du dialogue, de la concertation, du partenariat". "Il n'y a pas d'autre méthode".

En voila une bonne solution pour éviter tout débat national. La négociation de "gré à gré" permet de mettre hors jeu les syndicats de salariés et impose un dialogue déséquilibré entre salariés et employeurs.

De quelle négociation parle t-on alors qu'on sait que 97% des entreprises ont moins de 20 salariés et qu'aucune obligation syndicale ne s'impose à elles. Dans tous les cas de figure si cette idée faisait son chemin, les employeurs annonceraient à leurs employés une baisse unilatérale de leurs salaires. Ce qui, comme le dit Laurent Wauquiez, ressemblerait fort à "du chantage dans cette période"

Ne nous y trompons pas, l'employeur et le salarié ne sont pas sur un plan d'égalité. Il n'existe qu'un lien de subordination entre le salarié et son employeur.

La loi est précise dans le domaine : Définition juridique (Cass. soc., 13 novembre 1996, Bull. civ., V, n° 386) : « … le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité de l'employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ... / ... » Ce qui signifie que l'employé n'est pas un "partenaire" de l'entreprise qui peut négocier facilement, sur un pied d'égalité avec son employeur comme Brice Hortefeux voudrait le faire croire.

L'acceptation d'une baisse de salaire qui repose sur le "volontariat" comme l'expliquent les dirigeants de Hertz se transformera sans nul doute dans le temps en ultimatum dans une grande majorité d'entreprises. En effet, dans une période de fort chômage, refuser ce "volontariat" équivaudra pour les salariés à hypothéquer leur avenir dans l'entreprise.

"Je suis sûr qu'il n'y pas un salarié, qu'il soit cadre ou pas cadre, qui considère que l'on doit conduire l'entreprise à la faillite sans rien faire", a lancé M. Hortefeux.

C'est clair. Néanmoins, combien d'actionnaires accepteraient de ne pas toucher une partie de leurs dividendes pendant une durée indéterminée pour permettre aux entreprises de trouver les moyens de continuer à fonctionner ? Or, les salariés ne sont dans la quasi totalité des cas ni actionnaires, ni associés dans les entreprises où ils travaillent. Ils ne touchent d'ailleurs jamais quoi que ce soit, lors de la revente ou cession de leur entreprise, mais découvrent beaucoup plus souvent la notion de ... réduction d'effectifs.

Bien entendu, Messieurs Hortefeux et Wauquiez oublient d'indiquer que "l'entreprise Etat" ne fait elle aucun effort pour contribuer à cette solidarité comme l'indique le dernier rapport Dosière :

Pour l'ensemble des ministères, les frais de communication (sondages, campagnes publicitaires, etc.) atteignent 50 millions d'euros. Sur ce point, c'est le ministère de l'Economie qui dépense le plus (12 milions d'euros), la Défense tourne aussi autour de 8 millions. La Justice et la Culture dépensent respectivement 3,2 et 3,4 millions d'euros.

Les sommes dépensées pour les déplacements aériens peuvent aussi surprendre car les ministres ont la mauvaise habitude de voyager avec de nombreux membres de leur cabinet. Que les Affaires étrangères ou le Commerce extérieur dépensent beaucoup pour leurs déplacements est naturel compte tenu de leurs fonctions. Mais on peut se demander pourquoi les frais de Rachida Dati et de son cabinet atteignent 416 000 euros alors que l'ancien secrétaire d'Etat aux Affaires européennes [Jean-Pierre Jouyet, ndlr] a dépensé 341 000 euros.

Enfin, pour les frais de représentation, la moyenne se situe entre 15 000 et 20 000 euros mensuels par ministre. De grosses sommes alors que les salaires des ministres ont été très sérieusement revalorisés en 2002. - Source Libération

Quelques détails publiés par notre ami Cpolitic

- 17 : Nombre de chauffeurs au ministère de la Justice, le tout pour… 18 voitures
- 60: surface en mètre carré de l’appartement de fonction occupé par Mme Boutin alors que ces collègues peuvent bénéficier d’un logement de 250m² comme Michel Barnier, Ministre de l’Agriculture.
- 500 : Montant en euros de frais journalier pour l’achat de journaux au bénéfice de Madame Rachida Dati. Sûrement pour apprendre à lire à sa petite Zohra…ou pour occuper ses interminables séances au Conseil de Paris. Soit en 2008 sur la base de 262 jours ouvrés, 131 000 euros de lecture. Madame Figaro, Voici, Gala doivent être ravis.
- 14 000 : C’est le revenu officiel en euro d’un ministre type (mais jusqu'à 20 000 € pour André Santini au nom du cumul des mandats)
- 21 000 : Montant en euros des frais professionnels que peut demander un ministre, bien supérieur à son traitement donc.
- 3 000 000: frais de représentation annuels du ministère des affaires étrangères du temps de Messieurs Douste-Blazy et de Bernard Kouchner

Sans oublier le train de vie de L'Elysée et de Matignon qui doublonnent entre eux et avec les ministères !

Devant tant d'empressement à faire baisser les seuls salaires nous suggérons à Messieurs Hortefeux et Wauquiez quelques mesures pratiques qui pourraient être prises dans cette période de crise économique :

- Supprimer le volet de la loi TEPA sur les heures supplémentaires qui devient caduc dans la mesure où les carnets de commandes des entreprises sont au plus bas. Cette suppression permettrait de réaffecter ces montants dans les finances de l'Etat pour des opérations de relance de la consommation.
- Exiger vraiment que les banques apportent leur soutien à TOUTES les entreprises en difficultés financières (ce qui n'est toujours pas le cas)
- Evaluer le nombre réel de hauts fonctionnaires et conseillers en tous genres qui font le bonheur de nos gouvernants et le réduire au nom de l'efficacité.

Et pourquoi pas,

- Considérer qu'étant responsables de la gestion de la crise, ils pourraient, comme les salariés, réduire leurs salaires et leurs frais jusqu'à la fin de la crise, afin de donner l'exemple !!!

A ce moment là, il sera temps d'en reparler ....


Crédit et copyright dessins
BAR

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