17 juin 2011

Contrat de travail unique : La précarité organisée ?

Selon l'association nationale des DRH : Il existerait en France des salariés en CDI hyper protégés qui empêcheraient les précaires en CDD de trouver leur place. Il serait donc urgent de précariser l'ensemble des salariés par un contrat de travail unique !

Le 1er novembre 2010, nous écrivions : « Trop de chômage et pas assez d'emplois. La gauche avait initié le concept du partage du travail au travers des 35H00. La droite, bien aidée en cela, par ses fondations et think tanks libéraux tiens à son idée : Flexibiliser à tous prix le contrat de travail et ainsi, partager le chômage entre tous ! » C'est au tour de l'association nationale des DRH de reprendre à son compte cette demande formulée par la Fondation Montaigne

Tout le monde le reconnaît : Depuis l'adoption de la rupture conventionnelle, il est assez facile de se séparer d'un salarié en CDI quelque soit son ancienneté.

Seulement, cette rupture ne peut s'obtenir, qu'après homologation et, bien entendu, dans la mesure où le salarié, est effectivement d'accord. Si ce n'est pas le cas, on s'oriente vers une procédure au tribunal des prud'hommes. Procédure, qualifiée par Laurence Parisot de : « facteur d'insécurité pour les entreprises » !

Du coup, depuis des décennies, les organisations d'employeurs affirment que ces protections pour les salariés sont un obstacle à l'embauche et que : « Faciliter le licenciement incite à recruter »

Quelques exemples ?

Yvon Gattaz, alors président du CNPF (ancêtre du Medef) qui avait annoncé que la suppression de l'autorisation administrative de licenciement se traduirait par la création de 400 000 emplois

Ernest Antoine Seillière, a aussi usé de l'équation simple : « pouvoir licencier en toute sécurité, c'est pouvoir embaucher plus facilement »

Et surtout : La suppression de la contribution Delalande qui était un obstacle à l'embauche des plus de 50 ans !

Avec les résultats qu'on connaît aujourd'hui !

L'effet rupture conventionnel ayant atteint sa vitesse de croisière, mais restant insuffisant, en termes de flexibilité, quoi de plus naturel d'entendre Jean-Christophe Sciberras, président de l'association des directeurs des ressources humaines, proposer, à l'occasion de leur assises nationales, où l'on va débattre, en présence de Xavier Bertrand de : « L’urgence de l’innovation sociale » l'extension à l'ensemble des salariés d'un contrat de travail unique !

Ainsi, selon Jean-Christophe Sciberras, les salariés en CDI seraient la cause du chômage des moins de 25 ans : « (...) Près d’un quart des moins de 25 ans sont au chômage et voient la perspective du CDI comme voie d’entrée principale vers l’emploi se raréfier. Il est aujourd’hui urgent de mettre un terme à un système complexe et rigide en ouvrant enfin de nouvelles pistes d'action pour une insertion durable des jeunes en entreprise (...) »

En gros, à défaut de sécuriser les plus jeunes, « insécurisons » tout le monde ! Mais, quelles sont ces : « pistes d'action » ?

Le CTU : « (...) ce contrat de travail unique s’énoncera sans référence au temps ; il sera par nature à durée indéterminée et se substituera à tous les CDI, CDD, contrats de missions, contrats saisonniers, actuellement en vigueur (...) »

Et en cas de licenciement ? : « (...) Les motifs de rupture seront alors la faute du salarié, la rupture d’un commun accord, ou la fin de l’activité sur laquelle ce salarié avait été affecté. Ce contrat à durée indéterminée pourrait être rompu assez facilement, du moins au début, la sécurité du salarié se renforçant au fur et à mesure que son ancienneté progresse dans l'entreprise (...) »

L'idée n'est pas vraiment nouvelle, écrivait déjà, le site web chefdentreprise en octobre 2007 : « Elle a été lancée en 2004 par les économistes Pierre Cahuc et Francis Kramarz, puis reprise par Michel Camdessus, ancien directeur du FMI. (...) En cas de licenciement, les exigences juridiques pesant sur l'entreprise seraient allégées (plus d'obligation de reclassement interne ou externe et le juge ne pourrait plus vérifier l'existence d'un motif économique) . Un allégement toutefois compensé par le paiement, au moment du licenciement, d'une indemnité proportionnelle à l'ensemble des salaires versés tout au long du contrat de travail (...) Et c'est ce que déplorent les associations patronales, qui trouvent ce contrat encore trop rigide pour être unique (...) »

Débat, relancé lors de la tentative de mise en place des CNE et CPE (2007). A cette époque, le syndicat Sud expliquait : « (...) les CDD et intérim ne représentent que 12 % des emplois et l’on voit bien du coup la bonne affaire pour le MEDEF consistant à précariser près de 90 % des salariés pour, prétendument nous le verrons, en « sécuriser » 12 %. En effet le salarié en CDD est quasi inlicenciable entre les dates de son contrat, ce qui n’est déjà pas le cas avec le CDI actuel et qui ne le sera plus du tout avec le Contrat de Précarité pour Tous (...) »

Certes, Nicolas Sarkozy qui avait inclut le contrat de travail unique à droits progressifs dans son programme l'a oublié en cours de route. Et, à quelques mois de l'élection présidentielle, il paraît peu probable, que celui-ci prenne le risque, de se mettre à dos, les électeurs salariés.

Mais dans la mesure où, comme le fait remarquer Le Figaro : « (...) Nul doute que le ministre du Travail, qui avait défendu l'idée d'un contrat de travail unique comme porte-parole du candidat Sarkozy, accueillera cette proposition d'un bon œil (...) » il n'y aurait rien d'étonnant que cette mesure puisse ressurgir, en cas de réelection de Nicolas Sarkozy et de l'UMP en 2012 !


Crédit photo
Relations sociales

3 commentaires:

Toto a dit…

De toutes façons le jour ou la droite pondra autre chose que des conneries, les poules autres des dents.

Ceci dit, on pourrait flexibiliser le marché du travail à condition (sine qua non) de mettre en place un revenu garanti (pour tous)

Anonyme a dit…

Que font les syndicats face à une telle aberration ?

Custin d'Astrée a dit…

Il se trouve que les syndicats communiquent dans les différentes sociétés sur le sujet, mais les salariés ne semblent pas vraiment sensibles.