15 mai 2018

Montée des populismes : pour le Medef, un simple manque de pédagogie patronale !


Selon Geoffroy Roux de Bézieux du Medef, la montée des populismes en Europe serait due à un déficit de pédagogie de l'économie de marché mal expliquée par les acteurs économiques. Un peu simpliste non ? 

Geoffroy Roux de Bézieux qui rêve de succéder à Pierre Gattaz était interviewé par le journal Les Echos. Outre les sujets habituels : Que ferez-vous si vous êtes élu ? quelle participations des salariés dans les entreprises et le numérique, les journalistes lui ont posé la question suivante : Y a-t-il une responsabilité des acteurs économiques dans la montée des populismes en Europe ?



Roux de Bézieux : "Oui, bien sûr qu'il y a une responsabilité des acteurs économiques, au moins à deux titres. D'abord, nous n'avons pas réussi à faire suffisamment de pédagogie de l'économie de marché. Il faut expliquer comment fonctionne l'entreprise. Ensuite, et cela rejoint la question des territoires, notre croissance doit être plus inclusive. Il faut embarquer toute la cordée, pour reprendre une expression présidentielle, et pas seulement les premiers de cordée. Le repli national que prônent les populistes n'est pas la solution, c'est certain, mais encore faut-il en convaincre les Français"

Mais où était Geoffroy Roux de Bézieux pendant les 5 dernières années ?

Hé bien, il était vice-président du Medef. Il est  donc coresponsable de la pédagogie distillée par son Président parfaitement résumée par Michel Offerlé dans le Monde: "Les années Gattaz n’auront pas renouvelé le Medef. Il porte la marque d’une représentation de l’économie française quelque peu obsolète ... Il avait souhaité être en 2013 à la tête d’un « Medef de combat », débarrassé de « l’hydre du social » pesant sur les agendas médéfiens ... Pierre Gattaz n’a cessé d’alterner satisfecit et dénonciations vigoureuses, voire provocations ..." 

Nous pouvons aussi lui ajouter la palme d'or dans son rôle de martyr perpétuel. Martyr qui reconnaissait du bout des lèvres en mai 2017 : "Je pense sincèrement qu'on a réussi de belles choses avec des baisses d'impôts, de taxes, avec le pacte de responsabilité et le CICE qui ont vraiment donné des marges aux entreprises". Sans oublier, bien entendu, le pins 1 Million Emplois qu'il a d'ailleurs assez vite retiré du revers de sa veste. 

Geoffroy Roux de Bézieux alors candidat contre Pierre Gattaz à la présidence du Medef, proposait la pédagogie suivante : "il pense qu’il faut porter le fer sur le coût du travail, réformer drastiquement l’assurance-chômage, travailler nettement plus longtemps avant de partir à la retraite, négocier plus de choses au niveau de l’entreprise, à commencer par la durée du travail"

Donc, le succès du populisme serait la conséquence d'une incompréhension économique ? Mais pas la mondialisation "heureuse" et ses coups de boutoirs que le Medef s'est évertué à vendre aux salariés.

Il est dommage que Geoffroy Roux de Bézieux ne se soit pas déplacé pour faire de la pédagogie dans les usines fermées pour des raisons d'optimisation fiscale et de bas salaires. Tout comme il est dommage qu'il n'ait pas trouvé le temps nécessaire pour venir expliquer aux chômeurs seniors comment ils vont s'en sortir lorsqu'ils seront en fin de droits. Et enfin, dommage qu'il n'ait pas trouvé quelques minutes pour rencontrer ceux qui à qui ont impose la profusion de CDD de courte durée. Mieux encore, nous ne doutons pas qu'il aurait trouvé des arguments "déterminants" auprès de ceux qui dans les quartiers attendent la "croissance inclusive" mais qui après des milliers de CV ne reçoivent aucune réponse des entreprises sollicités.

Oui, mais notre homme qui s'affirme comme profondément libéral pensait certainement en répondant aux Echos qu'il suffisait d'un constat succinct pour expliquer un vote extrême. Quant à : "embarquer toute la cordée, pour reprendre une expression présidentielle, et pas seulement les premiers de cordée" On ne saura pas dans l'interview qui prendra en charge le problème ni dans quelles conditions.

Le vote populiste monsieur Roux de Bézieux ne se nourrit pas, dans certaines régions d'incompétence en économie de marché mais de désespoir ou de colère. Colère entretenue, entre autre, par les versements colossaux aux actionnaires du CAC40, des montants
faramineux de certains salaires de managers, même peu efficaces sauf en licenciements et de l'accroissement des inégalités en termes d'emploi.

Ce vote est aussi la conséquence d'un discours anxiogène tenu depuis des années par votre organisation qui consiste à expliquer qu'il faut plus de flexibilité, voir imposer, des mini jobs, sommet de la précarité, comme vous le proposiez en 2013, pouvoir licencier plus vite et moins cher, être mobile au point d'aller chercher un CDD à 400 kilomètres de chez soi, instituer un contrôle quotidien cher à Pierre Gattaz des chômeurs et forcément travailler plus longtemps alors qu' 55 ans trouver un job est quasi impossible. 

Vous faut-il plus de raisons pour que de nombreux français veuillent retourner la table quel qu’en soient les risques.

On est bien loin de votre "pédagogie" qu'on pourrait qualifier de bazar tant elle est sommaire. Mais après tout, la question des Echos vous intéressait-elle vraiment ? Non, car ce qui vous intéresse c'est de diriger le Medef pour continuer à faire : "baisser le poids des prélèvements obligatoires avec deux priorités, les impôts de production et la fin des asymétries fiscales, normatives et réglementaires qui existent, au moins en Europe..." Dans la mesure où l'Europe prendra tout son temps pour bouger, on comprend que votre combat sera surtout axé sur les baisses françaises. Baisses qui devront être compensées par des coupes budgétaires de l'état qui viendront une fois de plus frapper les plus en difficulté.

Belle démonstration que votre pédagogie de l'économie de marché remède aux populismes ...

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